Charlaine St-Jean, doctorante en éducation, Université du Québec en Outaouais
Johanne April, professeure en éducation, Université du Québec en Outaouais
Nathalie Bigras, professeure en éducation, Université du Québec à Montréal

 

Des chercheurs nord-américains soulignent l’importance de l’éveil aux mathématiques dès la petite-enfance pour favoriser le développement cognitif et la réussite éducative en troisième année du primaire (Clements et Sarama, 2009; Duncan et al., 2007; McCain et al.,  2007). En effet, pendant cette période, les habiletés en mathématiques atteignent un stade plus abstrait, complexe et moins intuitif. Ces connaissances suggèrent de privilégier l’usage de notions de quantités et de nombres très tôt dans la vie, puisque les enfants seraient naturellement sensibles à ces notions et que même les jeunes bébés (dès six mois) auraient une conscience du nombre. Cette notion de quantité fait référence à la conscience du nombre d’objets contenus dans un ensemble (Clements et Sarama, 2009). Afin de mieux comprendre ces notions, prenons par exemple deux enfants qui participent au même événement.

En regardant la parade au cirque, Oliviane (3 ans) s’exclame « Regarde les clowns ! Il y en a beaucoup et de toutes les couleurs ! ». « Oui et regarde les trois chevaux » crie son grand frère Antoine de quatre ans. Puisque chaque enfant est sensible à différents aspects de son environnement, il est fort probable qu’Antoine ait été sensibilisé à la notion de quantité par les adultes de son environnement.

Qui plus est, selon Samara et Clements (2009) il semble que dès leur première année de vie, les bébés puissent reconnaître une certaine notion de quantité, tel qu’avoir conscience que trois objets est supérieur à deux. À cet égard, Sarama et Clements (2009) ont élaboré une progression développementale des notions de quantité et de nombre.

Le premier niveau fait référence à la reconnaissance globale du nombre d’objets sans toutefois reconnaître/nommer le nombre exact. Ce premier niveau est appelé la reconnaissance intuitive. Au fils de ses expériences, la reconnaissance des nombres de l’enfant se développe et il parvient à percevoir instantanément combien d’objets se trouvent devant lui. Cette capacité à reconnaître directement et immédiatement un nombre d’objets se nomme la subitisation. Par exemple, si on vous montre quatre doigts, il suffit d’une fraction de seconde pour que vous reconnaissiez le nombre sans devoir compter. Selon la progression développementale de Sarama et Clements (2009), la subitisation se développe vers l’âge de quatre ans. Ce type de reconnaissance rapide est essentiel aux additions et soustractions de plus en plus complexes que les enfants devront réaliser à l’école. Plusieurs enfants additionneraient en effet 3 + 2 en comptant trois objets, puis deux objets, puis en comptant tous les cinq. Mais si un enfant est capable de subitisation, il est plus susceptible de compter en commençant par trois, puis quatre et cinq, ce qui est plus efficace. Ainsi, il passe à la reconnaissance conceptuelle du nombre d’objets (le stade suivant) ce qui le prépare à se représenter mentalement les nombres (0 à 10) sur un continuum.  

Comment accompagner l’enfant à développer les notions de quantité et de nombre ?
Afin d’aider les enfants à développer ces notions, on peut insérer des notions de nombre dans les activités quotidiennes. On peut nommer des actions posées telles que « Oups, mes deux crayons sont tombés » ou « je vais couper trois carottes pour le souper. Peux-tu choisir trois carottes ? ». Ces verbalisations au sujet du concept de nombre permettront de sensibiliser votre enfant au mot nombre et de l’aider à établir une relation entre le mot nombre et une quantité spécifique (Clements et Sarama, 2009).

Ainsi, on peut demeurer attentif à l’environnement de l’enfant afin de saisir toutes les occasions pour nommer des petits regroupements de la vie quotidienne. Par exemple, en jouant dehors on peut dire : « regarde, il y a un avion dans le ciel ! » ou « compte avec moi les fleurs rouges ».

En somme, les mathématiques font partie de notre quotidien. En abordant ces concepts de quantité avec votre enfant, vous l’initiez aux bases des mathématiques essentielles à sa réussite scolaire ultérieure. 

 

Références
Clements, D.H. et Sarama, J. (2009). Early Childhood Mathematics Education Research. Routledge, 409 p.

Clements, D.H. et Sarama, J. (2016). Mathematics Everywhere, Every Time. The National Council of Mathematics, 2, 322-324.

Duncan, G. J., Dowsett, C. J., Claessens, A., Magnuson, K., Huston, A. C., Klebanov, P., …, Japel, C. (2007). School readiness and later achievement. Developmental Psychology, 43(6), 1428-1446.

McCain, M.N., Mustard. J.F. et Sankers, S. (2007). Early years study 2: putting science into action. Toronto, Ontario: Council for early child development.

Sarama, J. et Clements, D. H. (2009). Early Childhood Mathematics Education Research: Learning Trajectories for kids. Buffalo: Routledge Edition.