Par Vincent Chouinard, travailleur social pour AutonHommie, centre de ressources pour hommes

 

Chaque année, des centaines de pères se voient interpeller par la Direction de la protection de la jeunesse (DPJ). Plusieurs d’entre eux font appel à AutonHommie dans ce contexte. Une proportion importante de ces hommes considère que leur relation avec la DPJ est problématique. Bien sûr, il est éprouvant pour un parent de se faire dire que sa situation conjugale ou personnelle compromet la sécurité ou la santé de son enfant. Cela dit, parallèlement au besoin d’améliorer leurs capacités parentales, les pères qui nous consultent vivent en général trois types de problèmes.

 

Le premier problème est la judiciarisation de la situation. Les pères se retrouvent parfois devant les tribunaux avec tout ce que cela comporte d’enjeux, notamment sur le plan financier. Les pères sont ainsi appauvris de quelques milliers à quelques dizaines de milliers de dollars en frais d’avocats. Cela crée aussi une asymétrie des pouvoirs qui entraîne son lot d’inégalités : l’homme, parfois seul, devant les professionnels de la DPJ et leurs avocats. Cette situation amplifie la perte de confiance des pères envers le système, alors que l’on souhaiterait exactement l’inverse.

 

Le deuxième problème est que les pères sont parfois confrontés à des stéréotypes ou à de doubles standards, que ce soit par la banalisation de la violence des mères, l’amplification de celle des pères, la tendance à octroyer un veto à la mère pour les contacts père-enfant, ou par de la violence structurelle qui décontextualise les comportements des pères. Ces attitudes nuisent à l’intérêt des enfants et au droit à la dignité des pères.

 

La dernière difficulté rencontrée est l’application de mesures rigides et persistantes dans le temps. Le commentaire entendu dans presque tous les cas est : « Peu importe ce que je fais, la DPJ n’est jamais contente. Je ne sais plus quoi faire! » Nos intervenants corroborent que la ligne de base de la DPJ est parfois difficile à suivre. Ce qui cause le plus d’incompréhension ou de désespoir chez les pères est les situations où la période de contacts supervisés s’éternise ou semble injustifiée. On observe aussi des cas où la DPJ respecte de manière aléatoire les volontés exprimées par les enfants de voir leur père.

 

De l’aide existe


AutonHommie travaille à ce que les pères fassent partie de la solution, et non seulement des problèmes en matière familiale et conjugale. Nous savons que l’engagement des papas a des retombées positives auprès des enfants et de l’autre parent. Parmi les initiatives récentes qui semblent les plus pertinentes, on note l’accompagnement individuel des pères par notre organisme (rendu possible entre autres grâce au financement du ministère de la Justice). Le fait de prendre part au dossier et parfois d’être présent au moment des rencontres entre les pères et les intervenants de la DPJ permet d’améliorer la collaboration ainsi que la confiance et la persévérance des pères dans leurs démarches. Nous encourageons donc les hommes qui se reconnaissent dans ces difficultés à consulter un organisme d’aide aux hommes pour décharger les émotions négatives, se recentrer sur leur capacité parentale et augmenter leur perception que la tempête DPJ finira par passer. Mais surtout pour comprendre qu’ils en sortiront en meilleure position pour tisser des liens forts avec leurs enfants.