Par Mariane Sawan, Doctorante et co-chercheuse, Science, technologie et société, UQÀM, CIRST
Coïncidence ! J’ai été appelée à rédiger cet article une soirée où ma fille, 14 ans et demi (et j’insiste sur le demi !!) « chattait ». Ses examens approchent, mais elle est sûre et certaine d’avoir « parfaitement accompli » ses devoirs et études ! Une nouvelle photo de profil est affichée sur Facebook avec effervescence et réveille les sens puis fait couler l’encre digitale pour des minutes et des heures d’insouciance ! Je jette un coup d’œil sur les commentaires, bien que « relativement respectueux », un brin osés mais « cool » et du type « genre, tsé, lol, omg, tc, plus sexy que…, beau …, ne devrais-tu pas… ?... », je ressens une certaine nausée et je me dirige en urgence vers mon bouquin de méditation. Ou serait-ce une séance de yoga intense ce soir, en guise de préparation de la leçon, à répéter encore et encore !
….Pour faire une histoire courte, et faire suite aux articles et entrevues que Familléduc et ses experts avaient offerts sur le sujet, des questions s’imposent et se reposent :
1- Où en est-on avec cette liberté d’expression, ou plutôt avec cette libéralisation et libertinage numérique ? En vérité, qu’est-ce que « liberté d’expression » pour nous, mais aussi pour nos ados ? La comprennent-ils vraiment ? Pourquoi insistent-ils à s’exprimer ainsi ?
Nous connaissons déjà les risques et les impacts négatifs possibles, même si involontaires : intimidation, discrimination, irrespect, diffamation, gros mots… Mais comment agir ? Les balises existeraient-elles au niveau familial, social, politique ou institutionnel ?
En premier, je vous affirme que les balises de l’éthique existent sur tous les niveaux ! S’intégrer dans la vie numérique de nos ados est chose possible. Cependant, il faut le faire d’une manière professionnelle et délicate. Afin de pouvoir répondre à leurs moues et répliques, une petite recherche sur les lois et les droits nous permet de comprendre et de leur expliquer que
la Liberté d’expression comme Droit existe tout en possédant ses limites, elle doit respecter d’autres droits et non pas les brimer : on est libre d’afficher une opinion, un mot etc. tant qu’il ne blesse pas, n’intimide pas et ne constitue aucun acte de diffamation ni de discrimination. Il reste donc à sensibiliser davantage nos jeunes à la différence entre public et privé, les inviter à réfléchir avant de publier ou accepter un commentaire, et développer leur sens (numérique) de l’auto-respect et du respect d’autrui.
Le chapitre C-12 (CHARTE DES DROITS ET LIBERTÉS DE LA PERSONNE – Québec) est clair : « Tout être humain a droit à la vie […] à la liberté de sa personne. 3. Toute personne est titulaire des libertés fondamentales telles la liberté de conscience […] de religion, […] d’opinion, la liberté d’expression […] 4. Toute personne a droit à la sauvegarde de sa dignité, […] honneur et […] réputation. 5. Toute personne a droit au respect de sa vie privée. 10. Toute personne a droit à […] l’exercice […] des droits et libertés […] sans distinction, exclusion ou préférence fondée sur la race, la couleur, le sexe, la grossesse, l’orientation sexuelle, l’état civil, l’âge sauf dans la mesure prévue par la loi, la religion, les convictions politiques, la langue, l’origine ethnique ou nationale, la condition sociale, le handicap ou l’utilisation d’un moyen pour pallier ce handicap. Il y a discrimination lorsqu’une telle distinction, exclusion ou préférence a pour effet de détruire ou de compromettre ce droit. 10.1. Nul ne doit harceler une personne en raison de l’un des motifs visés dans l’article 10. 11. Nul ne peut diffuser, publier ou exposer en public un avis, un symbole ou un signe comportant discrimination ni donner une autorisation à cet effet. »
Pour le mot de clôture je vous souhaite un bel été « éthiqueté » ! Les graines du bon sens sont là, il suffit de les arroser pour qu’elles fleurissent !