Par Thomas Henry, coordonnateur CooPère
Un père, défini comme « toute personne s’identifiant homme et se sentant en responsabilité d’un enfant », est le plus souvent un individu ayant été élevé dans les stéréotypes du genre masculin. Ces normes de socialisation viennent avec des avantages et des inconvénients, dont un en particulier : les hommes prennent moins bien soin d’eux-mêmes. Sur le plan de la santé, ils sont ainsi plus touchés par diverses problématiques (alcoolisme, tabagisme et consommation en général ; dépression et suicide), et leur espérance de vie est plus courte. Il en est de même pour d’autres questions psychosociales : plus haut taux de décrochage scolaire et d’actes violents (et donc de criminalité et d’incarcération). C’est avec ces balises que les hommes s’engagent dans leur paternité.
Ce grand changement de vie, extrêmement déstabilisant (surtout en période périnatale, moment évoqué comme l’un des plus vulnérables de la vie) peut également être un moteur de transformation profonde. Mais comment peut-on vivre la paternité comme une occasion de se transformer profondément? Quels sont les fondements d’un engagement paternel sain? Et à qui cela profite-t-il?
L’engagement paternel
L’engagement paternel est défini comme la participation et la préoccupation continues du père biologique, adoptif, du beau-père ou du père substitut envers le développement physique, psychologique, scolaire, spirituel et social de son enfant. Vaste programme!
Ses effets bénéfiques sont bien documentés et concernent autant les pères, les mères et les enfants (et ce, peu importe la composition familiale ou l’orientation des personnes). Pour ces derniers, l’engagement paternel a des effets sur le plan de la santé physique (aide à la mère pour l’initiation et la poursuite de l’allaitement, possible prévention des cas de mortalité néonatale et infantile), sur le plan socioaffectif (meilleure régulation émotionnelle, meilleur développement socioaffectif, moins de difficultés sur les plans émotionnel et comportemental, moins d’anxiété, moins de symptômes d’hyperactivité, de difficultés socioaffectives et meilleure estime personnelle à l’adolescence) et sur le plan cognitif (avantage sur les plans langagier et cognitif, développement des habiletés en lecture et en mathématiques vers 8 à 10 ans, facteur de réussite scolaire). Pour les parents, on note moins de stress parental, une plus grande estime d’eux-mêmes, un meilleur sentiment d’autoefficacité, moins de détresse psychologique et une amélioration du bien-être personnel. Et pour les couples, on sait que plus le père est impliqué dans une variété d’activités (soins, jeux, tâches domestiques), plus les deux parents se disent satisfaits de leur relation conjugale. De même, lorsque les pères s’occupent des enfants seuls au moins quelques fois par semaine lors de la première année de vie de l’enfant, la relation conjugale serait plus stable à long terme et moins sujette aux séparations.
Ces effets bénéfiques de l’engagement paternel se manifestent d’autant plus si le père s’implique dans tous les aspects de la vie de l’enfant, y compris les tâches de soin à l’enfant et les tâches domestiques. Être un père engagé, c’est donc remettre en question les normes de socialisation masculine.
La coparentalité : une condition préalable
Une relation coparentale existe lorsqu’au moins deux individus ont une responsabilité conjointe à l’égard du bien-être d’un enfant, ce qui n’implique pas forcément une relation amoureuse. Bien que les pères d’aujourd’hui soient plus investis dans les tâches et responsabilités liées aux enfants et au foyer que leurs prédécesseurs (en nombre d’hommes participant aux soins et aux tâches domestiques, mais aussi en nombre d’heures qui y sont consacrées), les femmes assument davantage de responsabilités sur ces deux plans, sont majoritairement celles qui s’absentent du travail lorsque les enfants sont malades et sont proportionnellement plus nombreuses à vivre un niveau plus élevé de conflit famille-travail. De plus, les mères sont plus souvent responsables de la « charge mentale », définie comme « tout le travail invisible de gestion et de planification des soins aux enfants et des tâches domestiques ».
Dit plus simplement : les normes de socialisation masculine traditionnelle ont des effets négatifs sur la santé et le bien-être des hommes (et donc des femmes et des enfants). L’engagement paternel, dans une perspective de coparentalité, permet de remettre en question ces normes. Ainsi, il encourage les hommes à prendre soin d’eux et à avoir de meilleures relations avec les femmes et les enfants. Par conséquent, susciter, encourager et maintenir l’engagement paternel, dans un esprit de coparentalité, est l’une des manières de favoriser la santé et le bien-être des hommes, des femmes et des enfants. Avec un effet secondaire non négligeable : des rapports père-mère plus équitables, qui donnent déjà à l’enfant un exemple de rapports égalitaires hommes-femmes.
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